Vous ne saviez pas quelles étaient les relations entre l'Union Européenne et les Etats-Unis, ce billet devrait vous intéresser !
Edité au Journal Officiel le 22 Septembre 2009, l'avis du Comité Economique et Social Européen que nous allons étudier aujourd'hui (1) a été voté le 25 mars 2009 par 196 voix pour, contre 7 voix contre. Il passe en revue les relations transatlantiques telles qu'elles sont à ce moment là (2 ans après la signature de l'Accord Cadre pour la promotion de l'intégration économique transatlantique (2)), et essaie de donner les objectifs à atteindre pour "améliorer la participation de la société civile".
Il aborde en 4 grands sujets que nous allons étudier et décrire, notamment sur le Conseil Economique Transatlantique, mais aussi concernant la mondialisation et les échanges, le réchauffement global et les groupes de pression transatlantiques (dont nous avons fait une chronique dernièrement (3)).
Le Conseil Economique Transatlantique
On commence par rappeler au point 1.5 que l'objectif de l'Accord Cadre de 2007 ("parvenir à un approfondissement de l'intégration économique et de la croissance transatlantique au bénéfice de nos citoyens et de la compétitivité de nos économies") doit être réalisé sous la supervision du CET. Le coeur de cette mission, comme l'explique le point 1.6 est "l'idée de coopération réglementaire". Malgré cela, "l'UE, dans ses relations transatlantiques maintiendra le défense de son modèle social".
Au point 1.7, on rappelle que "le protectionnisme a aggravé la Grande Dépression des années 1930" et que "Le CET devra jouer un rôle de contrôle des tendances protectionnistes en Europe, aux Etats-Unis et dans le monde". Il dispose d'un vaste programme pour ses "initiatives de coopération réglementaire". On veut lisser les différences "importantes et inutiles [qui] subsistent".
Le CET devrait notamment veiller à faire avancer le combat pour le droit de propriété intellectuelle et "intensifier les efforts conjoints en ce qui concerne le contrôle de l'application des droits dans les zones problématiques majeures telles que la Chine". Enfin, "il y a lieu de conférer aux législateurs européens et américains un rôle renforcé dans ce processus" : Une petite caresse démocratique ne ferait en effet pas grand mal à ce processus.
Au point 4.1.2, le CESE explique que le CET devient de plus en plus important "car en vue d'une relance [...] le développement d'une nouvelle approche commune visant à garantir une réglementation effective et efficace du système financier mondial est nécessaire". Il y a donc une volonté globale de régulation des marchés.
Lorsqu'il fut créé en 2007, le CET a été mandaté d'une "autorité considérable pour faire progresser l'intégration économique transatlantique, en particulier en temps de crise". Il a donc carte blanche pour donner ses objectifs et ses deadlines (point 4.2.1).
Au point 4.2.4, on trouve un petit historique du CET. On y met l'accent sur les réussites de celui-ci, concernant les rapprochements de vision sur la sécurité, les normes d'informations financières, sur la question des fonds souverains et pour la coopération réglementaire.
Au point 4.2.5, on rappelle aussi que "des différences importantes et inutiles subsistent dans les méthodes employées [...] pour élaborer de nouvelles réglementations [...] Si nous voulons vraiment encouragé l'intégration économique, il y a lieu de faire avancer ces dossiers", autrement dit, de lisser les différences de fonctionnement entre nos deux systèmes. Le CESE espère aussi pouvoir "renforcer la consultation des acteurs concernés" et donc remettre au centre du processus les dialogues transatlantiques, pourquoi pas celui de l'Environnement ou du Travail par exemple ?
Les échanges commerciaux : Condamnation du protectionnisme
Au point 1.9, posant comme un fait que "Tout retour au protectionnisme dans le monde serait source d'un net aggravement des défis économiques actuels, à l'image de ce qui s'est passé dans les années 1930" (Maurice Allais étant mort dernièrement, il serait intéressant de voir ce que le seul Nobel Français d'économie en aurait pensé), le CESE encourage les deux acteurs à se serrer les coudes et à coopérer étroitement afin de "tenir les engagements pris [...] au sommet du G20 le 15 novembre 2008". Ils devront en plus hâter la fin du cycle de Doha : "conclure précocement et avec succès le cycle de Doha et ainsi empêcher la création de nouvelles entraves au commerce et à l'investissement".
On comprend que le CESE n'est pas dupe des protections que mettent en place régulièrement les américains pour protéger leurs entreprises, et explique que "le point de vue de la nouvelle administration [du président OBAMA] gagnera à être clarifiée plus avant auprès de ses partenaires commerciaux".
Changement climatique global
Le CESE est très ambitieux en matière de lutte contre le Changement climatique, et explique au point 5.1 que "les mesures visant à relancer la croissance doivent, à l'échelle mondiale, être l'occasion de créer des emplois verts et de réorienter les investissements et l'innovation dans cette direction".
Pour ceux que la conférence de Copenhague a pu les intéresser, le CESE prépare au sein de cet avis cette conférence (point 5.3).
Implication des groupes de pressions (Dialogues Transatlantiques)
Concernant le changement climatique, on apprend au point 5.5 que le CESE encourage la Commission Européenne et la nouvelle administration américaine à "réactiver le Dialogue Transatlantique sur l'Environnement (TAED), qui pourrait faire fonction d'organe de coordination pour les partis prenantes en matière d'environnement et de partenaire de ces préparations".
De plus, "Les dialogues transatlantiques instaurés au cours de la deuxième moitié des années 1990 n'ont pas tous été aussi ctifs les uns que les autres", note le CESE, avant d'expliquer qu'ils "ont été intégrés de manière inégale dans les structures de coopération UE-Etats-Unis, en particulier dans les sommets UE-USA, qui ont été axés exclusivement sur le dialogue commercial transatlantique (TABD)". Si vous avez lu les précédentes chroniques et que vous vous êtes un peu intéressé au dialogue transatlantique, vous saviez déjà ce que vient d'expliquer le CESE au sein de cet avis. Aussi, "le groupe des conseillers du CET n'inclut que le TABD, le TACD et le TLD" (voir chronique transatlantique #9 (3)), et le CESE de conclure : "Le dialogue transatlantique des partenaires sociaux (TALD) et le dialogue transatlantique sur l'environnement (TAED) ont été exclus sans consultation des acteurs impliqués" (point 6.1).
Au paragraphe 6.2, le CESE rappelle que le Parlement Européen, dans sa résolution du 8 mai 2008 (dont nous avons fait une description ici même (4)), "demande que les présidents du TALD et du TAED soient inclus dans le groupe des conseillers. Le CESE soutient pleinement l'appel du Parlement Européen".
On apprend au point 6.6 que le "TACD fonctionne bien et participe très activement aux préparations des sommets UE-USA ainsi qu'aux travaux du CET". Plus loin au point 6.7, le CESE explique que "Après un démarrage relativement réussi, les activités du TAED ont malheureusement été suspendues après deux ans" et encourage les acteurs à mettre en place "des mécanismes de financement suffisants pour les dialogues transatlantiques [...] et d'inclure le TALD et le TAED dans le groupe des conseillers du TEC".
Comme à son habitude le parlement, par la voix du CESE encourage les deux acteurs à "accroître le caractère accessible et ouvert du processus du dialogue transatlantique, et à étendre l'association des parties prenantes de la société civile", et ce dans le but de "conférer un soutien populaire et une légitimité démocratique à l'ensemble du processus". Une bien étrange vision de la démocratie et de la légitimité d'un processus qui se déroule depuis plus de 20 ans sans avoir jamais été débattu par personne.
Conclusion
Nous avons vu beaucoup de choses dans cet avis du CESE. Pour commencer, on donne une grande responsabilité au Conseil Economique Transatlantique dans la gestion du processus d'intégration économique. Rappelons que le CET est une organisation gouvernementale qui ne regroupe pas d'élus du peuple, mais simplement des hauts fonctionnaires nommés de part et d'autre de l'océan Atlantique. Le CESE voudrait que cette institution s'occupe aussi de l'aspect environnemental et social, en intégrant le TAED et le TALD dans ses "conseillers officiels".
Concernant le réchauffement global, on veut un rapprochement des positions euro-américaines, et l'on veut un haut niveau d'engagement pour le sommet de Copenhague, ce qui, si vous avez un peu suivi l'affaire, n'aura pas lieu.
Enfin cet avis est intéressant car il met sur la table les ambitions européennes (ou du moins, les ambitions du CESE, car ce n'est pas lui qui décide, mais la Commission et le Conseil) concernant l'implication de la société civile (gageons que la société civile n'est pas la représentation démocratique du peuple, mais un groupements de fondations et d'ONG diverses et variées). Pour le CESE, il est temps de réactiver le TAED, qui n'avait eu d'activité que pendant 2 ans (1998-2000) avant de gêner les exécutifs des deux côtés de l'Atlantique, qui ne s’embarrasseront pas pour lui retirer leur soutien. Il avoue aussi que depuis le départ, seuls deux groupes ont réellement été pris en compte dans le processus transatlantique : le TABD et le TACD, représentant respectivement les grandes multinationales et les associations de consommateurs.
Le CESE recommande au CET d'intégrer au sein de ses conseillers officiels le TALD et le TAED. En effet, pour donner un vernis un peu plus démocratique à tout cela, il faut aussi prendre en compte les ONG gouvernementales et les partenaires sociaux transatlantiques. Sachant que le TALD est une organisation qui regroupe les syndicats de travailleurs mais aussi du patronat.
L'intégration avance, et toutes les instances européennes y auront été liées, sans, encore une fois, que ce sujet ne soit débattu et relayé au sein des différentes sociétés européennes (ou américaine), alors même que c'est un sujet majeur, que le marché commun transatlantique qui mènera une interconnexion telle de nos économies, qu'une "Commission Transatlantique" (le futur proche du CET ?) et une "Assemblée Transatlantique" (déjà appelée et réclamée par le parlement européen), et donc une effective aliénation de la souveraineté européenne.
Notes :